Belgrade (Serbie)
Septembre 2023

La Ville Blanche

Demeurant sur une falaise rocheuse au confluent du Danube et de la Save, Belgrade doit son nom de "ville blanche" au calcaire de ses murailles aujourd'hui disparues. La cité située à la charnière entre l'Occident et l'Orient a connu une histoire mouvementée, ponctuée d'innombrables conflits et destructions. La dernière date de la guerre du Kosovo, en 1999, quand Belgrade subit les bombardements de l'OTAN dont la ville a souhaité garder les cicatrices en conservant un certain nombre de bâtiments à demi éventrés.


En découvrant la capitale serbe pour la première fois, une évidence saute aux yeux : la rareté de monuments antérieurs au 19ème siècle, témoignant donc de l'histoire tourmentée de la nation. Il ne faut donc pas hésiter à marcher de quartier en quartier, se balader le long du Danube et de la Save et pousser jusqu'au village de Zemun pour capturer toutes les saveurs de la région.

Stari Grad

C'est dans cette zone, aux portes de la forteresse, que Belgrade s'est développée au 19ème siècle après l'indépendendance : églises, musées, galeries, théâtre, ... le quartier concentre toutes les grandes institutions. La place de la République, par exemple, a été le témoin de grandes manifestations pour la défense de la démocratie dans les années 1990 à 2000. Entourée du Musée national et du Théâtre national, elle se situe dans un vaste environnement piétonnier et est le lieu de rendez-vous numéro un de la ville. En son centre, la statue du prince Michel III Obrenovic pointe du doigt la direction d'Istanbul et des territoires ennemis (ndlr: l'empire Ottoman).

Non loin, les vastes esplanades du parc et de la forteresse de Kalemegdan sont des immanquables. Sa structure à vocation défensive avec son talus incliné préserve la forteresse des attaques surprises et ses remparts en brique dessinent un plan en pointe infranchissable à l'époque. On s'y promène au milieu d'espaces arborés, de pavillons, de fontaines et de statues. Différents musées militaires, tours de garde, édifices religieux s'additionnent à la visite.

La forteressse n'a pas conservé de palais mais elle offre l'occasion d'une balade dans un superbe site, au confluent de la Save et du Danube avec depuis ses remparts, l'un des points de vue le plus spectaculaire de Belgrade.

Dorcol est une agglomération a double-sens. La plupart des visiteurs se contentent d'arpenter les rues chics et propres du "Haut-Dorcol" tandis que les plus curieux se dirigent vers l'ancienne partie du quartier, le "Bas-Dorcol" où de plus en plus de bars et restaurants surgissent de terre, à l'image de la rue Strahinjica Bana. Historiquement c'est dans ce quartier que se trouvait la toute première brasserie de la ville et où, aujourd'hui, s'érige la mosquée Bajrakli datant de 1668, l'un des derniers héritages de l'occupation ottomane. Je souhaite également mettre en avant le district de Skadarlija, qui avec ses pavés et ses petites maisons, semble nous transporter dans une campagne profonde de Serbie.

Vracar et Neimar

Une autre Belgrade se dévoile ici, traversée de larges boulevards, aérée par de nombreux espaces verts servant d'écrins à des bâtiments tantôt religieux, tantôt officiels, datant du 19ème et du début du 20ème siècle. Un visage résolument résidentiel avec de petites rues tranquilles où fourmillent plusieurs hôtels particuliers.

Le parc des Pionniers, dédié aux fondateurs du régime communiste, est encerclé par un trio architectural des plus saisissant. Au nord, par le Parlement de Serbie : d'une éclatante blancheur et habillé d'un escalier monumental garni de statues de bronze représentant des chevaux cabrés retenus par deux Hercules. Et au sud par la mairie et le palais présidentiel : la mairie qui a donc ses bureaux au "Stari Dvor" ou "ancien palais" construit au temps de la dynastie des Obrenovic. Une façade sobre sert d'entrée principal mais le reste du bâtiment est orné de décors, sculptures et de balcons. Juste en face, le "Novi Dvor" ou "nouveau palais" est devenu le cabinet présidentiel après la première guerre mondiale et la chute de la royauté yougoslave.

Deux édifices religieux de style complètement différent se partagent le quartier. L'église Saint-Marc s'impose au regard par sa taille et ses couleurs vives. Inspiré du monastère de Gracanica (dans l'actuel Kosovo), cet édifice médiéval est coiffé d'un haut clocher et de dômes encadrant une grande coupole centrale. Sa forme en double croix et son mélange de briques et de pierres sont vraiment magnifiques à voir.

Et enfin l'église Saint-Sava, la plus grande église de la ville, elle est aussi l'une des plus grandes églises orthodoxes des Balkans. Impossible de passer à côté, juchée sur une colline et couronnée d'un dôme vert visible à des kilomètres. Elle a mis du temps à se construire suite à l'enchaînement des conflits mais l'attente récompense tous les visiteurs d'aujourd'hui. Son intérieur est quasi intégralement recouvert de mosaïques et la crypte, au sous-sol, est probablement encore plus féérique. Un splendide livre d'images sur chaque mur et plafond.

Le musée Nikola Tesla consacré à l'un des inventeurs du courant alternatif occupe une villa au coeur de ce quartier résidentiel. Après un intéressant film retraçant l'histoire de ce génial inventeur, un guide présente diverses expériences électriques à l'aide de turbines et de transformateurs à oscillations inventés par Monsieur Tesla au cours de sa vie. Une façon ludique d'en apprendre un peu plus sur la science.

Savamala

Cette ancienne zone de marais, qui s'étire le long de la Save de part et d'autre du pont Brankov, a été le premier quartier à s'urbaniser de façon exponentielle pour devenir, de nos jours, le coin le plus huppé et le plus dynamique de la capitale. Des bâtiments modernes et d'anciens entrepôts réaménagés par des artistes, créateurs et designers. Un "waterfront" devenu un lieu très vivant de jour comme de nuit, les quais ne se vidant de sa foule que tard dans la nuit.

Zemun

Sur les rives réservées aux promeneurs, sont amarrés les pittoresques "splavs", des bateaux et des constructions flottantes devenus inséparables du visage de Belgrade. La plupart abritent des cafés, des restaurants mais également des hôtels et des résidences privées. Il est en tout cas, très agréable de se promener le long du Danube et des berges, de ressentir cette atmosphère détachée alors que l'on n'est qu'à deux pas du centre-ville.

Changement complet d'ambiance à Zemun : ruelles pavées, maisons aux tons pastels, petit marché et une aura de village. Ottomane, puis austro-hongroise, elle est tristement connue pour avoir été le lieu de départ des premiers bombardements sur Belgrade en représaille de l'assassinat du prince François-Ferdinand d'Autriche et son épouse faisant trébucher le monde dans ce qui a été la première guerre mondiale.

Aujourd'hui, on peut difficilement résister aux charmes de cette cité à taille humaine avec son petit centre piéton, ses nombreuses églises et son marché populaire. La tour Gardos propose un très joli panorama sur la vallée du Danube. Haute de 36 mètres, il s'agit de la dernière tour encore debout après les nombreux conflits du passé. De son sommet, une vue imprenable sur la vieille ville et les églises de Saint-Nicolas et celle de l'archange Gabriel. Une escapade à ne pas rater.

Au coeur de l'histoire serbe

Ces quelques jours à Belgrade ont été une très belle découverte. D’une beauté insoupçonnée par la plupart, la capitale de la Serbie sait mettre en avant un patrimoine historique (certes rare) et une authenticité qui font de cette ville, une des étoiles montantes de l’Europe. Je n'ai qu'une envie maintenant, voyager dans tous les pays des Balkans.